FoixHistoire de vous faire patienter un peu, j’ai décidé de vous parler de ma plus belle découverte de ces dernières années. C’est un auteur guadeloupéen du nom d’Alain Foix. Pourquoi ma plus belle découverte ? Je m’explique. Je trouve que la littérature contemporaine, forte de ses intrigues, néglige souvent le style, l’amour des mots ciselés, des expressions imagées. Et avec Alain Foix, c’est un véritable festival, un régal pour les sens. Cet auteur manie la langue française, joue avec elle et redonne aux mots toute leur saveur.
Je vous donne un lien vers son blog si vous êtes davantage curieux : alainfoix.com/alain-foix/

C’est un peu par hasard que j’ai découvert cet auteur. Il s’est trouvé que sa fille était scolarisée dans le collège dans lequel j’enseignais il y a 4 ans. Il avait offert son premier roman publié à l’un des collègues de français de l’équipe, qui a eu à coeur de nous le faire découvrir.
Ce premier roman s’intitule Peintre peint sur papier peint et a été publié chez Galaade en 2005.
peintre_peint_sur_papier_peint_credit_raul_mansurEn apparence, un polar. Le cadavre d’un peintre est retrouvé dans le cadre de sa toile, le sang projeté sur du papier peint. Un corps mis en scène. L’inspecteur est une sorte de anti-héros que l’on va suivre de crime en crime, de rencontre en rencontre. L’éditeur présente le livre en ces mots :  » Un régal pour les auteurs de suspense et d’histoires baroques. De l’art
plastique à la musique contemporaine, Alain Foix nous entraîne au cœur
des milieux artistiques. Une écriture débridée et décalée, où le jeu
est partout présent : dans les mots, les images ou les situations. »
Ce livre est le premier volet des aventures de l’inspecteur Perez et j’en attends la suite avec beaucoup d’impatience.

foix_alain3J’ai ensuite eu le plaisir de lire un écrit autobiographique, Ta Mémoire petit monde chez Gallimard : un ravissement pour les sens, une écriture fine, poétique, presque enchanteresse. Ce récit voit l’alternance de deux voix : une qui dit « je » et l’autre qui dit « il ». On touche encore à la difficulté de se dire, de se raconter. Quelle est la voix qui permet le mieux de dire ce que l’on a été et comment l’on s’est construit ?
Pour le résumé, je me permets de vous copier-coller la présentation faite sur son site :
« « Petit monde », ti moun en créole, c’est Lino, l’enfant que fut l’auteur et dont il se souvient.
Il a huit ans quand il quitte son île de Guadeloupe avec Lucia, sa
mère, et s’embarque pour la métropole. Dix jours de traversée qui vont
tout bouleverser, et marquer douloureusement la déchirure avec Aurèle,
l’ouvrier de la mer, qu’il aime comme un père, les melons de maman
Telle, les accents du pays, et les averses qui réveillent les parfums
de la terre.
Tôt levée, tard rentrée de l’hôpital où elle fait des ménages, Lucia,
mère courage à laquelle Lino apprendra l’orthographe et la grammaire,
parvient à recréer un écosystème créole au rez-de-chaussée du dernier
immeuble de Bondy.
Plus tard, l’hôpital de Berck-Plage où Lino est envoyé sera une autre
déchirure, mais il en reviendra avec un nouveau rapport au monde. Puis
il y aura d’absolues nouveautés : les filles, la découverte de la
psychanalyse… La lecture passionnée de Tristes Tropiques, de Lévi-Strauss, et la mort d’Aurèle marqueront la fin de l’enfance et la dernière émancipation.
À travers la mémoire de l’enfant, ce petit monde dans le monde, c’est aussi toute une poétique de la banlieue qui surgit. »
Leiloona de BricàBook a écrit un très beau billet sur ce livre :

adamVénus et Adam, publié chez Galaade est le troisième roman que j’ai lu d’Alain Foix. Le 21/09/2001, pendant que la tourmente s’abat sur les Twin Towers, le corps d’un enfant noir , baptisé Adam par Scotland Yard,sans bras, ni jambes, ni tête, est repêché dans la Tamise. Un inspecteur et un journaliste vont tenter de démêler les fils de ce crime atroce. « Crime rituel ou crime raciste ? » Surgissent Vénus Bartmann, agent de la police scientifique, mais aussi une authentique vénus hottentote, et avec elles bon nombre de mystères.
Ce roman est littéralement envoûtant et entraîne le lecteur à se poser bon nombre de questions sur l’humanité. Le sordide du sujet est effacé par la grande poésie de l’écriture. L’auteur a ce don de sublimer l’horreur.

Mais Alain Foix n’écrit pas que des romans. C’est aussi un dramaturge, auteur de six pièces de théâtre. J’ai eu l’occasion de lire sa pièce Pas de prison pour le vent. Mais aussi d’assister à la lecture de sa pièce Le ciel est vide dans laquelle il imagine que Shylock et Othello errent ensemble au purgatoire, ignorant la présence de Jessica et Desdémone.25735
Mais Alain Foix s’illustre aussi dans d’autres genres : la biographie (Toussaint l’Ouverture), la jeunesse (Histoires de l’esclavage racontées à Marianne, Aujourd’hui en Guadeloupe : Lou à Sainte-Anne) et à paraître bientôt un essai Obama, la couleur et les mots.

Pour vous donner une idée de la beauté des phrases de cet auteur, voici un petit florilège de citations :
* «Les rêves vivent leur vie de rêves et leur réalité naît de la nôtre comme l’ombre de la lumière.» Vénus et Adam
*
«La science a ses mauvais rêveurs qui prennent leur ombre pour la lumière et leur vertige pour de l’amour.» Vénus et Adam
* « 
Le socle grinçait en tournant. Sans doute sous l’effet de son poids.
Corps sculptural. Grand, puissant mais fin, très dessiné. Il était
imposant et il le savait. Il s’était fait poseur. Modèle, comme on dit.
Mais lui, il disait poseur. Modèle, non. Il s’y refusait obstinément.
Il n’avait à ses yeux rien d’un mannequin, un objet, une potiche
reproductible à l’infini, interchangeable et jetable. Il posait, donc
il imposait. » Peintre peint sur papier peint.

Voilà j’ai essayé de vous présenter l’auteur qui me tient le plus à coeur depuis 4 ans. Il ne me reste plus qu’à vous conseiller de vous jeter à corps perdu dans la lecture de ses oeuvres.