Le-Vase-ou-meurt-cette-verveine

    Voilà un petit moment déjà que j’ai lu ce livre, que j’ai rencontré l’auteur, que je dois vous en parler. Tout d’abord, je voulais garder en moi certaines impressions de lecture si fortes que je n’avais pas envie de les partager tout de suite. Et puis, cette semaine, l’envie de bloguer n’était pas là. Alors ce matin, je vais tenter de rendre hommage à ce très joli roman.

    Voilà cinquante-six ans que Zika et Joseph sont mariés, une longue vie d’amour. Mais Zika est malade, il faut l’hospitaliser pour faire des analyses, la soigner. Alors ils doivent rendre la maison. Joseph est recueilli par leur fils et sa famille, Zika est hospitalisée près de leur fille. Commence alors une correspondance très touchante entre les deux époux puisque Zika déteste le téléphone. De longues lettres pour se dire à quel point on s’aime, à quel point on se manque, se raconter les souffrances de nos enfants et faire le bilan d’une longue vie de couple.

    Ce roman m’a touchée jusqu’au fond des tripes. Vous savez, c’est ce genre de roman qu’on apprécie encore plus car il tombe au bon moment, car il donne l’impression de parler directement à son lecteur, d’avoir été écrit pour lui. Toute cette réflexion sur l’amour qui résiste au temps, qui est plus fort que tout… en pleine époque où les couples se font et se défont dans un battement de cils…

    On y lit également toute une réflexion sur la vieillesse et sur l’évolution du rôle parents-enfants. La chute du roman est très dure. Je n’y ai jugé aucun des personnages, me contentant de trouver la situation tellement douloureuse pour chacun.

 

Quelques jolies phrases : 

* « Et voilà qu’ils entrent en crise comme d’autres entrent en religion, au moment précis où nous avons besoin d’eux. Peut-être que dans cette période où les rôles s’inversent, ils éprouvent le besoin de retrouver leurs parents tels qu’ils les ont toujours connus ? J’ai pensé qu’ils se rendaient compte de notre soudaine fragilité, de cette dépendance qui s’impose à pas feutrés – une perte après l’autre – et que leurs nouvelles responsabilités les effrayaient autant qu’elles les bouleversaient. »

 

* « Je t’embrasse comme tu aimes, je t’embrasse comme je t’aime, tout en moi crie le manque et l’impatience de te retrouver. »

 

* Oui, aimer, être aimé, c’est une effraction si intime, si puissante. […] Et ne sont-ils pas à plaindre, ceux qui ne se laissent pas envahir, ceux qui ne consentent pas ? […] Ah ce dernier baiser, connaîtra-t-il une suite, ou est-ce l’ultime ? Les suivants survivront-ils à l’absence, viendront-ils au monde ? Le fil d’aimer va-t-il se tendre ou se rompre ? »

 

*  » Ecrire, oui, c’est possible, mais parler, oh, parler ! S’extraire de pauvres mots, des mots impuissants, sentir sa gorge nouée, ce poids sur la poitrine. Et ne pas pouvoir, non, ne pas pouvoir trouver une seule phrase qui soit fidèle à ce qu’on ressent. Vouloir s’expliquer et se trahir soi-même. Quelle douleur, quelle humiliation ! Cette incapacité à dire est une lèpre sèche qui ronge l’homme et causera sa perte. Il faudrait être vide et ne plus avoir matière à penser. »