couloir

© Romaric Cazaux

 

    Quelle joie de te voir tout au bout de ce couloir, quelle excitation ! J’ai mis ma plus jolie robe pour cette occasion ! Oui, oui, c’est vrai, encore une nouvelle. Mais c’est bien pour cela que c’est la plus jolie… avant la prochaine.

    J’aime cette attente, cette distance courte mais suffisante avant ce moment où tu vas me serrer dans tes bras ! J’aime imaginer que toi aussi, tu t’impatientes et attends fiévreusement le moment où je surgirai dans ton dos, feignant presque la surprise de me voir arriver par là. C’est ce qu’est l’amour : ce mélange de surprise béate de voir que l’autre est encore là avec cette douce certitude que ça ne pourrait en être autrement.

    Aujourd’hui, je suis chaussée de légères ballerines, afin que tu ne m’entendes pas traverser le couloir et que je puisse profiter jusqu’à la lie de la vue lointaine de tes contours… Afin que j’aie le temps de me rapprocher, de voir ta carrure se dessiner, de plus en plus précise. Un autre jour, sans doute, je choisirai les escarpins et arriverai triomphante, clac clac clac, déterminée et femme jusqu’au bout de chacune de mes extrémités. Mais aujourd’hui, je me fais légère, discrète et profite de l’instant jusqu’au bout du bout. Parce que soyons honnête, il n’y aura peut-être pas d’autre jour. Je vais tout tenter certes… mais la vérité est que si tu es à m’attendre sur ce trottoir, pour la première fois, et non devant ma porte, je le sais, c’est que tu veux me quitter.

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