Une photo, quelques mots (87)

    Le plus souvent possible, le lundi, je participe à l’atelier de ma soeur cosmique « Une photo, quelques mots ». J’aime cet atelier parce qu’il m’a permis d’écrire régulièrement et forcément d’être un des tremplins  à mon envie d’écriture plus longue mais aussi parce qu’il m’a permis d’approcher des plumes et de leur proposer de s’embarquer avec moi. Je vous en parle très bientôt.

   sauvez votre dimanche Ce lundi, je n’ai pas eu le temps ni l’énergie pour écrire. J’avais passé le week-end à reprendre le texte de mon roman et plus rien n’était capable de sortir de ma pauvre cervelle. Mais comme cette photo sert de base à un beau projet de ma copine Framboise, qu’elle va mener avec l’Université de Toulon, je vous propose un texte pour sauver mon dimanche (hein ma Laurie) et j’espère le vôtre aussi.

Une photo, quelques mots
Harcèlement de rue

 

Brumaire 2072, dans une exposition parisienne

 

          – Monsieur, Monsieur !

          – Oui, Maxence, qu’y a-t-il ?

          – Qu’est-ce que c’est, là, sur cette photo ? Ce drôle d’accoutrement ?

      Plus de cinquante ans auparavant, on avait appelé ça une jupe. Il en existait une autre déclinaison qui formait un vêtement tout d’une pièce : la robe. Il avait fallu supprimer cela, trop de problèmes. On avait bien tenté de ne pas en arriver là, mais les créatures qui les portaient étaient, depuis l’origine de l’humanité, la raison de tous les fléaux sur cette Terre.

      La fin du XXème siècle avait causé beaucoup de problèmes : des illuminés leur avaient donné le droit de vote, de conduire seule une voiture, d’avoir leur propre compte en banque, de demander le divorce et tenez-vous bien de choisir ou non si elles voulaient enfanter. Le chaos avait failli s’abattre sur notre planète.

    Au début du XXIème siècle, des gens que l’on avait surnommés « radicaux » voire « terroristes », avaient eu une première idée. Enfin, elle n’était pas nouvelle mais bien remise au goût du jour. Au nom d’un obscur créateur, on avait tenté de soustraire le plus possible le corps de ces tentatrices à la vue de l’humanité fragile qu’elles ont toujours projeté de précipiter dans le chaos. On avait décliné ça en plusieurs tailles : niqab, burka et autres noms un peu exotiques qui m’échappent aujourd’hui. Mais l’espèce était enragée, déterminée. Elle ne cédait pas…

    Alors, il a fallu passer à la vitesse supérieure, on n’avait pas le choix. Désormais, elles vivent en petit groupe, dans des endroits retranchés, à l’abri, pour leur bien. Une fois par an, des médecins procèdent à une saillie. Elles crient un peu mais dans l’ensemble, ça se passe bien. Les jeunes mâles sont en bonne santé, vigoureux. Pour les femelles qui en naissent, on ne garde que celles qui promettent des hanches larges, propices à la maternité. Les autres, jugées trop malingres, sont étouffées sans douleur. Et on a trouvé une hormone à leur donner qui assure une bonne production de lait. Le seul bémol, leur espérance de vie a bien diminué depuis qu’elles mettent bas presque tous les ans. Mais on ne fait pas d’omelette sans casser des oeufs.

     – Oui, mais Monsieur, les hommes, là, qu’est-ce qu’ils font ?

     – C’est quelque chose qui a été appelé « harcèlement de rue », ça consistait à rappeler aux femmes à quel point elles étaient sales et méritaient d’être insultées et ramenées à leur vraie fonction.

    – Laquelle, Monsieur ?

     – Maxence, tu es un garçon curieux et intéressé, je l’inscrirai sur ton livret d’évaluation. Les femmes donc avaient été crées pour la reproduction et satisfaire le besoin de l’homme. La morale de cette histoire est qu’il ne faut pas tenter de sortir du rôle qui nous a été assigné.

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30 réflexions au sujet de “Une photo, quelques mots (87)”

  1. Très originale comme idée à partir de cette photo ! ça me donne vraiment envie de me lancer à chaque fois que je lis les textes qui sont produits avec la photo du lundi ! Bravo !

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  2. J’adore 😉 même si ton texte est toutafé flippant…
    Merci ma belle, important pour moi que tu sois là (ça me tient chaud)
    je t’embrasse plein plein plein et merci infiniment (tu me sauves mon dimanche-avant-rentrée-erf !)
    <3 <3 <3

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    • Flippant justement pour ne jamais oublier que nos droits ont été acquis de haute lutte et qu’on ne doit pas baisser notre vigilance, sinon on nous les reprendra. Et vu que c’est ainsi que l’ont traite les vaches dans les grandes exploitations, je voulais faire un parallèle pour montrer aussi l’horreur de leur condition qui ne semble émouvoir personne .

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      • Et dans certains pays déjà, les droits les plus élémentaires sont refusés aux femmes, et cela ne semble déjà plus émouvoir personne …
        Tu as bien raison Stéphie, ne fermons jamais les yeux, soyons vigilants, ces droits fièrement acquis peuvent être à tout moment repris …
        merci

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  3. Et bim…ça m’a rappelé les nouvelles de F Martin et du futur sombre qui nous attend si nous ne prenons pas soin de nos libertés et droits maintanent. Le parallèle avec la traite des vaches est bien trouvé et flippant. Très joli texte. Je suis vraiment bluffée à chaque fois.

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  4. Top!….Et ce serait encore plus top d’arriver à enrayer le processus avant d’en arriver là….Alors même si c’est une goutte d’eau dans la mer ça fait du bien de faire le job et de participer dans notre coin….Je suis sûre que ton texte va avoir un impact fort….

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  5. Ah oui, tu ne fais pas dans la dentelle… mais ça a le mérite d’être un sacré rappel à l’ordre.
    J’ai tout de suite pensé à la vidéo que tu avais posté à propos sur la traite des vaches.
    Ce texte est très réussi.

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